3 ans de prison pour la femme battue

Le Procureur a requis 3 ans de prison pour la femme battue

Josiane devra porter un bracelet électronique durant six mois. Le 8 jan- vier 2012, elle avait tiré un coup de fusil sur son mari, grièvement blessé.

Je n’ai pas fait exprès de lui tirer dessus. J’ai voulu tirer en l’air, dans le plafond, pour l’intimider, mais je tremblais tellement, alors le coup est parti. C’est accidentel. Celle qui parle est une sexagénaire qui, à la barre du tribunal, raconte une nouvelle fois la terrible nuit du 8 janvier 2012. Avec ses mots, cette petite femme portant des lunettes se défend. Quitte à agacer le tribunal, le parquet et même son avocat.

Ce soir-là, en Amboisie, Josiane et Jean dînent. Et se disputent. Les deux anciens amoureux, mariés en 2010, sont en instance de divorce. Alors que la discussion porte sur le partage de la télévision et de la voiture, elle finit par s’envenimer sur fond d’alcool. Une habitude dès que le week-end s’annonce.

Josiane s’en va chercher son fusil (donné par son frère) puis s’installe dans la lingerie, où elle dort désormais. Elle s’enferme. Arme son fusil et attend. Jean s’est approché. A-t-il tenté d’ouvrir la porte une ou plusieurs fois ? Pas de réponse précise. D’ailleurs, Jean n’est pas venu au tribunal, représenté par son conseil, Me Chameau-Demontoux. Josiane, elle, explique avoir eu peur : « Je savais qu’il allait défoncer la porte et que j’allais prendre des coups de poing ».

«  Votre réaction était totalement disproportionnée  »

Plusieurs épisodes de violence ont marqué l’histoire du couple, entamée en 2007 grâce à une petite annonce. Josiane n’a jamais déposé plainte, n’a jamais pris la décision de partir (« Pour aller où ? C’était ma maison ») malgré« les volées », les marques, les témoignages. A la barre, elle explique vivre « sous la coupole (sic) » de son mari qui ne souffre aucun retard ni erreur de cuisson.

Ce soir-là, donc, le coup est parti, tiré à une distance d’1,92 m de la porte, à une hauteur de 1,18 m du sol. Du calibre 16 qui a traversé la porte et atteint l’abdomen de Jean. Les blessures sont conséquentes. Josiane a appelé les urgences d’Amboise avant de tirer. Puis un voisin pour qu’il prévienne les secours, après.

Face au tribunal, elle évoque à nouveau « un accident ». La présidente, Christine Blancher, la reprend aussitôt :« Non, Madame, ce sont des violences volontaires. Et votre réaction, ce soir-là, est totalement disproportionnée. »

La tentative d’homicide volontaire, qui aurait été jugée devant la cour d’assises, a été requalifiée en violence aggravée avec arme.

Quid de Jean ? Son état n’est toujours pas consolidé. Il n’a pu reprendre durablement le travail, la blessure ayant provoqué plusieurs éventrations. Son avocate demande un renvoi sur intérêts civils, une expertise médicale et une provision de 5.000 euros.

Pour le ministère public, « les violences sont caractérisées » et « l’expertise balistique exclut tout tir accidentel ». Il rappelle, en outre, les mesures de protection possibles dès que les violences conjugales sont avérées, avant de requérir trois ans de prison, laissant au tribunal l’entière appréciation du sursis.

Me Damiens-Cerf, avocat de la défense, revient sur l’histoire de Josiane et des deux hommes qui ont partagé sa vie, violents. « Le coup de feu ne se conçoit pas si Jean n’est pas auteur de violences conjugales. Elle était mal entourée, poursuit-il, mettant également en avant « la possible altération du contrôle de ses actes au moment des faits »énoncée par un expert.
Le tribunal l’a condamnée à trente-six mois de prison dont trente mois avec sursis simple. Un aménagement (bracelet électronique) est mis en place. La prévenue est reconnue entièrement responsable du préjudice. Une expertise médicale et une provision de 5.000 € sont décidées pour la victime.

Vanina Le Gall
La Nouvelle République
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